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Humeurs

Le Syndrome d’Ehlers-Danlos et moi

Il y a désormais 10 ans, lorsque j’ai fait mon AVC, une neurologue a – enfin – mis un nom sur les nombreux symptômes que je présentais depuis l’enfance. Non je n’étais pas folle, ni ma mère d’ailleurs qui me trimballait de médecin en médecin, jusqu’à ce que je dise stop. Je suis atteinte du Syndrome d’Ehlers-Danlos, associé à la Filaminopathie A (j’ai donc deux maladies génétiques, je suis chanceuse).

Le Syndrome d'Ehlers-Danlos, multiples symptômes
Des Syndromes d’Ehlers-Danlos, de multiples symptômes

Le Syndrome d’Ehlers-Danlos : une maladie génétique (pas si) rare

Préparez-vous à un long, très long article, car il y a beaucoup de choses à dire sur ce syndrome. Je vais succinctement vous le présenter, puis je vous parlerai des conséquences sur mon quotidien. Précision importante : ce syndrome possède une multitudes de symptômes, avec une base commune – on parle d’ailleurs des SED – donc chaque cas est vraiment personnel.

Le Syndrome d’Ehlers-Danlos : késaco ?

« Le Syndrome d’Ehlers-Danlos est l’expression d’une atteinte du tissu conjonctif (fibres de collagène, 80% environ des constituants d’un corps humain) d’origine génétique, touchant la quasi-totalité des organes – on en trouve dans la peau, mais aussi dans les os, les tendons, les parois des vaisseaux sanguins, etc. ce qui explique la richesse de sa symptomatologie ». Pour faire simple, le SED est une jolie petite saloperie qui touche essentiellement les filles (80% des cas).

Les principaux symptômes du SED : les signes qui ne trompent pas

Comme je le disais précédemment, chaque personne atteinte du SED a un son diagnostic propre. Néanmoins, il existe un socle commun de symptômes, plus ou moins aggravés selon que vous faites partie des SED vasculaires, non vasculaires, hypermobiles ou « pas trop ».

La fatigue, toujours, tout le temps, sans répit

Gros symptôme du SED, la fatigue. On ne parle pas de fatigue habituelle, mais bien d’une fatigue permanente, qui vous colle au corps non-stop. Pour vous situer mon niveau de fatigue, petit point de comparaison : ma fatigue des bons jours équivaut pour vous à une journée la tête dans le cul, avec une difficulté à se concentrer. Pour moi, c’est la routine et la promesse d’une journée pas trop dégueulasse.

La fatigue

Ma fatigue niveau moyen équivaut à une belle gueule de bois, avec un casque sur la tête et la sentence suivante dans la tête : « Continuez sans moi les gars, je vais vous ralentir ». Enfin, la fatigue level cosmique, presque indécente, celle qui me rend presque inopérante, équivaut pour vous à une bonne grippe carabinée. Il faut que je dorme.

Ma fatigue m’accompagne tous les jours. Quand on me demande comment je vais, impossible de répondre « Je suis fatiguée ». Je serai toujours fatiguée, même un jour où je serai à mon maximum. C’est comme ça, je vis avec. Donc quand vous êtes fatigués, vous touchez du doigt ce que je vis, tous les jours. Quand je dis à mes amis que je suis fatiguée, c’est que le level cosmique est atteint, je ne fais pas semblant.

La douleur, partout, tout le temps, sans répit ou presque

Articulaires, abdominales, musculaires, gynécologiques, de migraine, etc. La douleur est si présente que parfois, je l’oublie. L’une des particularités du Syndrome d’Ehlers-Danlos est de s’attaquer à tous les organes du corps, aux articulations (l’hypermobilité est l’un des symptômes iconiques du SED). Rien ne l’arrête.

La douleur, constante.

Mes articulations me saluent chaque jour qui passe. Mes épaules se déboîtent si souvent – des luxations en pagaille – que je dois dormir avec des coussins pour me caler sur le côté. Sinon, « cling-cling », l’épaule concernée se déboîte et se réenboîte comme si de rien n’était, heureusement pour moi. Parfois, le nerf se coince. Et là… Idem pour les hanches qui commencent depuis quelques temps leur cirque.

Mes genoux me portent, mais je ne sais pas comment : subluxés à l’infini, ils ne sont retenus que par l’intervention du Saint-Esprit. Je ne peux faire de sport comme l’individu lambda : le vélo est interdit, l’aquabiking est aussi interdit (mes genoux ont dit stop en se barrant sans me demander mon avis) et me tenir sur les rotules est impossible (pour le Pilates par exemple) : je n’ai plus de cartilages.

Mes chevilles sont peu ou prou dans le même état. Adepte des entorses forcées réalisées sans trucage à base d’une simple marche à pieds, je suis malheureusement une cliente régulière de ma kinésithérapeute. Mon entorse du moment date d’il y a 5 ans environ et n’a jamais guéri. Si je marche un peu trop longtemps sans ma chevillère, je replonge. Joie et bonheur.

Côté intestinal, c’est également la fête à neu-neu. Sujet peu glamour, le SED s’attaque également aux intestins (et à la vessie, mais ce n’est pas mon cas pour le moment). Opérée en 2003 de la vésicule biliaire, je ne vis maintenant que pour des WC à proximité immédiate. Terminées les gourmandises sur le pouce, la street-food, les glaces… si je ne sais pas où se trouvent les toilettes les plus proches. Côté vie sociale, cela impacte énormément mes choix : si je ne suis pas bien, je picore, voire je ne mange pas prétextant que je n’ai pas faim. Si je suis bien, je dois tout de même faire attention aux WC. Dans les événements professionnels, j’évite tout simplement de tenter le Diable et je m’abstiens.

J’ai également fait la connaissance des colites intestinales : très douloureuses. Vous avez un couteau à pointe acérée dans le ventre pendant des jours. Je suis pliée en deux dans ces moments-là, mais il faut avancer…

Les troubles vasculaires : des bleus, des hémorragies, des veines extra fines

Les troubles vasculaires existent chez tous les malades, à des niveaux variables. Cela peut aller du « simple » bleu quand on effleure un coin de table à de vraies et sales hémorragies ou anévrismes.

Chez moi, ces troubles se traduisent essentiellement par un petit souffle au cœur pas bien méchant (vs ma mère qui a de gros problèmes cardiaques), des bleus qui apparaissent « comme ça » et des veines/artères aussi fines que des feuilles OCB. Il faut que je fasse attention. Si je me cogne fort, l’hématome peut être vraiment costaud.

Les veines, la vie

Les troubles vasculaires se sont manifestés de manière hardcore au moment de ma puberté, mais à l’époque évidemment, le lien avec la SED n’était pas établi. J’ai été réglée tardivement, à 16 ans, et pendant trois mois non-stop. Autre petite joyeuseté, ce sont pas trois gouttes qui tombaient (la contenance des cups aujourd’hui me laisse perplexe), mais des bassines. Bref, j’étais anémiée, malade comme vous pouvez vous en doutez. Par la suite, j’ai appris très tôt que j’aurai de grandes difficultés à avoir des enfants et l’AVC aidant, c’est hystérectomie qui a mis fin au flot rouge incessant. Une vraie libération.

Enfin, je redoute les prises de sang. J’ai UNE veine qui donne, elle est en fin de vie. Pour le reste, c’est l’angoisse. Mes veines (et artères, coucou les gaz du sang) sont minuscules, trop fines et elles roulent. L’angoisse je vous dis.

Moi et mon SED : ensemble, c’est tout

J’ai, bien évidemment, d’autres petites choses sympathiques à mon actif, grâce à ce syndrome. Mais il est temps de conclure cette longue prose. Plusieurs choses sont importantes pour conclure :

Je vis au quotidien avec le Syndrome d’Ehlers-Danlos et ça va. Je n’ai pas trop à me plaindre. Je suis parfaitement capable de travailler à temps-plein, dans un bureau. Mes capacités mentales ne sont pas amoindries, loin de là, je tiens la barre. Je prends les transports en commun, même si cela me fatigue vite, je sors, je vis. Certains malades sont en fauteuil roulant, d’autres se luxent tellement les articulations que les gestes du quotidien sont un Enfer. Quant à la douleur, je la gère pour le moment.

Hier n’existe pas. Avant-hier non plus. Aujourd’hui, c’est délicieux. Demain est merveilleux.

HENRI SALVADOR – la joie de vivre (2011)
Beautiful day - joie de vivre

Si vous pensez être atteints de ce Syndrome, consultez des médecins qui connaissent la chose (de plus en plus de professionnels sont à l’écoute des patients, mais le chemin est encore très – trop – long). Des pistes avec Claude Hamonet ou des centres de référence comme l’hôpital Pompidou à Paris pour les SED vasculaires, ou Raymond Poincaré pour les non-vasculaires.

Renseignez-vous également auprès d’associations (SEDinfrance, Gersed, l’Unsed ou l’Afsed), ne restez pas seuls dans votre coin.

Merci d’avoir lu ce billet jusqu’au bout.

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Bulles de Flo, c'est le résultat de mes coups de cœur lifestyle du moment : culture (livres, cinéma, etc.), décoration, balades... Bienvenue chez moi !

6 Comments

  • Le cercle parfait
    juin 24, 2020 at 12:26 pm

    Bonjour,
    Super intéressant comme article !
    J’ai découvert cette maladie par hasard, en suivant une fille sur youtube.

    Je me posais une question.
    vec toutes ces douleurs et fatigues, comment fais tu pour tenir le coup, professionnellement parlant ?

    Bonne journée

    Reply
  • Blonde and Peonies
    juin 25, 2020 at 2:51 pm

    Je te souhaite beaucoup de courage et de force car ça ne doit pas être facile, des bisous 🙂

    Reply
  • Annafaitsonblog
    juin 25, 2020 at 5:14 pm

    Coucou 🙂 Je ne connaissais pas du tout cette maladie donc merci pour ton article. Ca ne doit en effet vraiment pas être évident au quotidien…
    Je sais que ce n’est vraiment rien comparé à toi mais j’ai aussi des soucis intestinaux et je passe aussi mon temps à regarder où sont les toilettes, à angoisser quand je dois faire de longs trajets en voiture ou lors d’une randonnée, ou quand il fait très chaud. Ca peut me tomber dessus à tout moment (et d’ailleurs ça l’est déjà arrivé, c’était assez folklo)
    Bon courage pour la suite en tout cas. Bisous <3

    Reply
    • Le boudoir d'Amandine
      juin 28, 2020 at 10:25 am

      Coucou !
      J’ignorais l’existence de cette maladie. Comme toi, j’ai des problèmes intestinaux, ça n’est rien comparé à ce que Flo peut vivre mais c’est particulièrement pénible. Toujours à l’affut des WC et quand ça me prend, ben ça me prend. C’est une grosse source de stress pour moi !

      Reply
  • Vanessa
    juin 26, 2020 at 2:51 pm

    Tu es très forte Florence malgré tout ce parcours compliqué ! Tu ne te plains jamais et pourtant, tous ces symptômes dûs au SED t’en donnent l’argent le droit… Bravo pour cet article, sans pudeur !
    Bisous copine/voisine !

    Reply
  • Sandy
    juin 28, 2020 at 4:48 pm

    Coucou ! Je ne connaissais pas du tout, merci pour ton article très instructif. Et plein de courage !
    Des bisous

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